Friday, October 29, 2010

J’irai dormir chez vous

Après 10 jours de silence radio, me revoilà avec de nouvelles aventures à vous raconter !

La dernière fois que j’ai écrit sur ce blog, c’était pendant mon voyage pour aller au Vietnam. J’y ai passé une douzaine de jours fabuleux, loin des cours et du campus, de la chaleur et de la poussière. Autant dire que le retour à Ahmedabad fut un peu rude (« hein quoi ? quel travail de groupe ? de quoi on parle ? »). Donc pour écourter au maximum ces moments désagréables où l’on se rappelle qu’on n’est pas totalement en vacances, je suis repartie deux jours plus tard pour Bombay, ou plutôt Mumbaï, car c’est comme ça qu’on l’appelle officiellement depuis 1995.

Quelques mots sur Mumbaï, pour vous situer le décor. Il s’agit de la ville n°1 en Inde selon plusieurs critères : population (l’agglomération de Mumbaï compte plus de 22 millions d’habitants, ce qui en fait une des dix villes les plus importantes au monde), économie et commerce (Mumbaï génère 5 % du PIB indien et son activité représente 25 % de la production industrielle, 40 % du commerce maritime et 70 % des transactions de capitaux de l'économie indienne), finance (avec la bourse et la banque centrale), et divertissement avec les studios de Bollywood. C’est aussi là que l’on trouve le plus grand bidonville d’Inde, des embouteillages monstrueux et des trains de banlieues tellement bondés que les gens ne sont même plus dans le train mais accrochés autour… Bref, c’est une ville assez dingue, mais paradoxalement très agréable à visiter. Et oui, là-bas il y a des trottoirs donc on peut se déplacer à pied (ça vous paraît normal, mais en Inde, c’est rare !), de larges avenues, des beaux bâtiments datant de la colonisation britannique, des promenades le long de la mer (à condition d’oublier l’odeur de déchetterie et de fermer les yeux sur les étendues de détritus qui parsèment la plage à marée basse), de bons restos, des cafés branchouilles, de quoi faire plein de shopping, etc. Vous l’aurez compris, j’ai beaucoup aimé cette ville !
Nous étions trois, Laura, Anaïs et moi, et nous avons testé pour la première fois le système du « couchsurfing ». Le principe est simple : créer une communauté en ligne de personnes qui mettent à la disposition d’autres personnes leur canapé (ou un lit, un matelas, la niche du chien, peu importe) pour pouvoir les héberger. Donc, par exemple, admettons que vous vouliez séjourner quelques jours dans une ville, disons Mumbaï (au hasard), et bien vous vous inscrivez sur le site, vous contacter des « couchsurfeurs » habitant Mumbaï pour leur demander l’hospitalité et, avec un peu de chance, vous obtenez une réponse positive de l’un d’entre eux. Pas mal, non ? Et bien c’est exactement ce qui s’est passé pour nous et c’est ainsi que nous nous sommes retrouvées à habiter chez Hema, une Indienne d’une cinquantaine d’années qui vit seule à Bandra, un quartier sympa et pas trop excentré.
Laura, Anaïs, Hema
Hema, c’est tout un numéro. Première chose, elle est extrêmement gentille. La preuve : elle nous a hébergé toutes les trois dans son petit appartement pendant 5 jours, nous a cuisiné des parathas au petit dèj’, promenées dans son quartier toute une journée, etc. Mais deuxième chose, elle est extrêmement lunatique et possessive… Possessive dans le sens où elle n’aimait visiblement pas être toute seule et donc comptait sur nous pour passer un maximum de temps avec elle, ce qui n’était pas exactement ce pour quoi nous étions venues à Mumbaï. Et lunatique, car contrariée pour un rien (la plupart du temps, on ne savait même pas pourquoi). Et quand Hema est contrariée, elle boude et fait des trucs pas sympas, comme par exemple s’endormir au moment de payer l’addition au resto, partir sans ses clés le soir où nous avions décidé de sortir pour nous obliger à revenir vite lui ouvrir la porte, cacher nos serviettes de bain pour nous empêcher de prendre une douche, etc. Ça peut paraître énervant comme ça mais rassurez-vous, ça nous a surtout valu de franches rigolades entre nous ! Donc une première expérience de couchsurfing très positive !
Coucher de soleil sur la baie
A deux pas des tours d'immeubles, certains quartiers ressemblent à des villages
À part ça, qu’avons-nous fait à Mumbaï ? Entre autres, un peu de culture avec les visites du Prince of Wales Museum, du musée d’art moderne et des galeries alentour, et de temples hindous et jaïns. De l’architecture en se baladant du côté de Victoria Terminus, de la Cour Suprême, de l’Université et du Gateway of India. Une bouffée de ce que peut être le luxe en Inde en rentrant dans le célèbre Hotel Taj Mahal, et l’extrême inverse en passant par les bidonvilles qui longent la côte. Du bateau pour aller visiter les grottes d’Elephanta Island, du divertissement avec un spectacle mêlant la jeunesse artistico-branchée de Bandra, du shopping au Crawford Market et sur Colaba causeway. Des bains de foule à foisons (il y a du monde partout !), et de la bonne bouffe en quantité (et même du bœuf au Hard Rock Café – et oui, en Inde, c’est quasi impossible à trouver !). 
Vue depuis le Prince of Wales Museum

Université
High Court

Taj Mahal Hotel et Gateway of India

Laura au Crawford Market

À la gare de Churchgate, nous avons aussi découvert l’étonnant ballet des dabbawallahs. En Hindi, une dabba, c’est une boîte. En l’occurrence, il s’agit des boîtes en métal dans lesquelles les Indiens transportent leur déjeuner. Les dabbawallahs, ce sont les livreurs desdites dabbas. Ils se chargent d’acheminer la nourriture de milliers d’employés de leur domicile à leur lieu de travail. En effet, beaucoup d’Indiens sont réticents à consommer des plats qui ne sont pas faits maisons, et ne font confiance qu’aux repas préparés par leur épouse ou leur cuisinière, notamment pour être sûr de respecter certaines prescriptions alimentaires.


Livreur, ça peut paraître simple comme ça, mais à Mumbaï c’est tout une aventure, du fait de l’immensité de la ville et de ses moyens de transport plutôt chaotiques. La logistique et l’efficacité des dabbawallahs sont assez incroyables. Le matin, les boîtes sont collectées dans les différents quartiers de la ville. Grâce aux inscriptions qu’elles portent, elles sont triées par destination puis envoyées par le train. À chaque gare, les boîtes correctes sont débarquées et remises à un dabbawallah local, qui les livre aussitôt à l'adresse correspondante, à pied, en charrette ou à vélo. Après le déjeuner, les boîtes vides sont rassemblées et renvoyées de nouveau dans leur maison respective.
Étant donnée la quantité de boîtes qui circulent (on estime que les dabbawallahs approvisionnent jusqu'à 175 000 clients par jour !), le système est archi-complexe et pourtant, il marche, c’est ponctuel et pas cher du tout ! La preuve que l’organisation en Inde, c’est possible et ça existe ;-)

Friday, October 8, 2010

Un week end à la plage

Le week-end dernier, nous, c’est-à-dire un bon petit groupe d’étudiants de l’IIMA, sommes allés à Diu, une toute petite île située à 400 km d’Ahmedabad.




J’ouvre tout de suite une parenthèse sur le thème « tensions inter-communautaires en Inde : l’exemple du verdict d’Ayodhya ». Ceux qui sentent leurs paupières s’alourdirent soudainement à la lecture du programme peuvent se rendre directement quelques paragraphes plus loin, où je traiterai d’un sujet beaucoup plus léger et non moins pas-sion-nant, à savoir la plage. Et pour ceux qui sont encore là, rassurez-vous, je n’y connais rien donc ça va être très court. 

Pourquoi brutalement soulever un sujet si grave ?? À vrai dire, c’est pour une raison profondément égoïste (soyons honnêtes !) : la peur de devoir annuler un week-end farniente à Diu. En effet, le jeudi précédant notre week-end devait être rendu un jugement portant sur le site d’Ayodhya, dans le Nord de l’Inde. Hindous et musulmans se disputent depuis des lustres à propos de cet endroit. Pour les hindous, il s’agit d’un lieu sacré puisque le dieu Ram est censé y être né. Le problème, c’est qu’il y a bien longtemps (en 1526 pour être exacte), un empereur Moghol, Babur (aussi appelé Babar, oui oui, comme le roi des éléphants), y a fait construire une mosquée, la Babri Masjid. Les tensions entre les deux communautés n’ont cessé d'augmenter depuis, jusqu’à atteindre leur apogée en décembre 1992, quand des hindous ont rasé la fameuse mosquée. De violentes émeutes ont alors éclaté dans différents endroits en Inde et notamment à Ahmedabad, faisant plus de deux milles morts.

Le gouvernement a depuis acheté le terrain et des fouilles ont été entreprises sur le site pour vérifier la présence d'un temple antérieurement à la mosquée. Quand, il y a dix jours, il a été question de rendre un jugement pour déterminer la validité des revendications des uns et des autres et ce qu’il allait advenir du site, tout le monde a craint que ça pète à nouveau. Le gouvernement a dégainé les grands moyens : pas loin de 200 000 policiers et militaires ont été déployés un peu partout. Les chefs hindous et musulmans ont de leur côté multiplié les appels au calme. Mais j’ai l’impression que globalement, les gens ne savaient pas trop quoi penser sur ce qu’il pourrait se passer à l’issue du jugement. Pètera, pètera pas ? À l’IIMA, on nous a conseillé de ne pas sortir du campus jeudi après-midi. 

Le jugement est finalement tombé en fin de journée. La justice a décidé que le site devait être divisé en trois parties : un tiers sera attribué aux représentants de la communauté hindoue, un autre aux représentants de la communauté musulmane, le dernier à une organisation hindoue. Par ailleurs, nous avons surveillé les infos régulièrement jeudi et vendredi et finalement, voyant que rien ne se passait suite au verdict tant attendu (c’est sans doute en partie dû au fait que les deux communautés ayant décidé de faire appel, l’affaire n’est en fait pas terminée), nous avons décidé de partir en week-end comme prévu. Et nous ne nous sommes fait attaquer par aucun fondamentaliste hindou ou musulman , ouf ! Voilà, je referme enfin cette loooongue parenthèse et reprends le récit du week-end glande – bravo à ceux qui ont lu jusque là ;-)

Pour aller à Diu, c’est facile, mais c’est long et pas confortable : 11 heures de bus-couchettes dont 3-4 heures de route défoncée, des arrêts dans des endroits glauquissimes et surtout, surtout, une quantité de poussière telle que je suis arrivée à destination noire de crasse ! Qu’à cela ne tienne, on en a vu d’autres, une bonne douche en arrivant et c’est reparti. C’est reparti bien pépère tranquille d’ailleurs, car nous logions dans un hôtel confortable avec… une piscine !! Plutôt une grosse baignoire en réalité, mais ça fait toujours plaisir. 

À Diu il y a de très belles plages. Les femmes se baignent tout habillées en sari donc je n’ai pas osé dégainer mon bikini, ça aurait franchement fait mauvais genre ;-) Mais à défaut de pouvoir nous baigner, nous avons fait une grande balade le long de mer, c’était bien sympa (sauf que bêtement nous avons fait ça entre 12h et 14h, donc aux heures les plus chaudes de la journée, et sans un centimètre carré d’ombre à l’horizon....).
 

La ville, Diu town, est mignonne aussi. Très très tranquille (voire complètement morte à l’heure de la sieste car alors tout est fermé !), avec de jolies maisons colorées et un ancien fort qui vaut le détour. Pour votre gouverne, sachez que Diu est un ancien comptoir portugais. Aujourd’hui encore, l’influence portugaise est évidente, notamment dans l’architecture des bâtiments (il y a une grosse église baroque dans la ville) et dans … la bouffe ! Ahh la nourriture à Diu, quel bonheur ! Au menu, plein de poisson (je n’en avais pas mangé depuis mon départ de France en août !), des légumes, et c’est même pas épicé. 
Miam !


Ah et aussi, Laura, Anaïs et moi nous sommes encore fait des potes indiens. Samedi soir, après avoir passé la soirée en ville, nous cherchions un rickshaw pour nous ramener jusqu’à notre hôtel située à quelques km de là (je sais pas combien exactement, mais en tout cas trop pour faire le trajet à pied). On cherche, on cherche et … on ne trouve pas. Niet, nada, que dalle, pas un rickshaw à l’horizon. C’est là que nos nouveaux copains entrent en scène : nous rencontrons des jeunes du coin qui viennent discuter avec nous (ça nous arrive tout le temps ici en Inde, les gens viennent toujours parler aux étrangers). Pour nous rendre service, ils se mettent aussi à la recherche d’un rickshaw, mais en vain. Que faire ?? La perspective de rester errer là toute la nuit ne nous tente pas tellement… Et bien pas de problème, tous à mobylette ! Nous voilà donc à 5 sur 2 motos (à l’aise !). Bon je sais c’est mal, faut pas se faire ramener par des inconnus, mais là on n’avait pas vraiment le choix. Finalement nous sommes arrivées à bon port, alors merci les Indiens, vous êtes quand même bien sympas !
 


Tout ça, c’était le week-end dernier, mais je n’ai pas le temps de m’ennuyer car je suis à nouveau en vadrouille. Et oui, sachez que j’écris ce message depuis l’aéroport de Kuala Lumpur en Malaisie (merci pour le wifi gratis) !! Je n’y fais que passer puisque mon but ultime, c’est Hanoi, au Vietnam. Je m’y rends pour le mariage d’Antoine (mon frère) et Giang, qui a lieu dans huit jours. Mais j’aurai l’occasion d’en reparler. 

A vol d’oiseau, Ahmedabad-Hanoi ça ne paraît pas très loin. Et pourtant le trajet est long !! Je suis partie hier en fin d’après-midi d’Ahmedabad, avec un vol pour Mumbai. Là-bas, changement d’aéroport, quelques heures d’attente, puis un autre vol pour Kuala Lumpur, où je suis arrivée il y a une heure environ. Et donc là j’attends la dernière partie du voyage, à savoir le vol pour Hanoi. Inutile de préciser que j’ai hâte d’être arrivée !